Bientôt le printemps… #CahierDeCrise n°2

Les questions arrivent toutes en même temps. Dans la période de repli, il faut particulièrement se soucier celles et ceux qui sont dans la difficulté en temps « normaux », s’il est juste de parler ainsi, les familles qui n’avaient pas de quoi payer la cantine, celles et ceux qui n’ont pas de logement, les privés d’emploi subissant la réforme de l’assurance chômage, les résidents des EHPAD… Et dans ce confinement, veiller contre les violences faites aux femmes et intra-familiales.

Chacune et chacun s’interroge à la fois sur le présent le plus immédiat et sur l’avenir qui se charge d’incertitudes. Ce matin, j’écris au PDG d’ArcelorMittal pour qu’il précise ses intentions et au ministre de l’économie et des finances pour que l’Etat suive de près l’évolution de la situation.

A l’assemblée, deux textes ont été examinés. 

Le premier porte sur quatre mesures financières (pour cela on rectifie le budget initial).

Le projet acte le renoncement aux privatisations dont celle d’ADP et revoit les prévisions de croissance pour se baser sur un produit intérieur brut en recul de 1%, et donc de moindres recettes. Tant en dépenses qu’en perte de recettes, cela semble en-dessous de ce qui nous attend. Les mesures prises portent sur :

  • le report des charges fiscales et sociales du mois de mars sur demande (des mesures d’annulation seront nécessaires) ;
  • un dispositif exceptionnel de chômage partiel valide jusqu’en septembre 2020 avec la prise en charge à 84% du salaire net jusqu’à 4,5 SMIC (cela va provoquer de grandes difficultés pour un grand nombre de salariés pour lesquels le maintien du salaire serait la seule possibilité de pouvoir payer leurs charges mensuelles incompressibles) ;
  • un fonds de solidarité pour les TPE-PME dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 1 million d’euros, fermées pour des raisons de sécurité sanitaire ou ayant perdu plus de 70% de leur chiffre d’affaires sur mars 2019, avec 1500 euros d’aide forfaitaire et des compléments si nécessaire ;
  • une garantie d’Etat à 90% pour les prêts de trésorerie des entreprises jusqu’à 25% du chiffre d’affaires annuel (à condition que la banque actionne le mécanisme).

J’ai proposé par exemple qu’on mette à contribution les assurances privées, qu’on rétablisse l’Impôt sur la fortune, pour se doter de ressources permettant de faire face. J’ai également demandé que soient adoptées des mesures en faveur de l’hôpital public. En effet, 2 milliards sont annoncés, sans apparaître pour l’instant nulle part, sans que les modalités d’utilisation et de répartition ne soient indiquées. Or, il y a des besoins et certains hôpitaux peuvent rapidement se trouver en difficulté de trésorerie, ce d’autant qu’ils ont reporté toutes leurs activités programmées par ailleurs. Avec mes collègues, nous avons soulevé la question du jour de carence pour les agents de la fonction publique, mesure d’autant plus incohérente dans la période. Le ministre a reconnu du bout des lèvres que c’était une question. Enfin, j’ai demandé des mesures contre les profiteurs de crise. Et j’ai proposé qu’on permette aux Etats de se financer directement auprès de la Banque centrale sans intermédiaires.

Le deuxième texte porte sur ce fameux Etat d’urgence sanitaire.

C’est une disposition qui n’existe pas et si l’on peut penser que des cadres sont nécessaires, il est toujours délicat de créer de nouvelles règles d’exception en pleine crise, sous le coup de l’émotion et du manque de recul. En l’occurrence, il s’agit de donner par décret des pouvoirs exceptionnels au Premier ministre et au ministre de la santé pendant un mois (alors que pour l’Etat d’urgence traditionnel, il s’agit de 12 jours) permettant de restreindre les libertés publiques (liberté d’aller et venir, liberté d’entreprendre, liberté de réunion, réquisitions et toutes mesures générales et individuelles pour lutter contre l’épidémie assorties d’amendes…) ; ce pouvoir peut être délégué au Préfet. Au-delà du caractère exorbitant de ces pouvoirs, l’absence de contrôle parlementaire est indéfendable. Même en nombre restreint et confinés, les représentants du peuple doivent pouvoir contrôler l’action du gouvernement, et faire vivre des formes démocratiques afin de questionner, d’interpeller, de proposer… Les élus locaux ont aussi un rôle décisif à jouer dans des situations de ce genre. C’est une condition indispensable à une société mobilisée face à une crise. Cette conception renvoie à l’idée d’un pouvoir centralisé qui se passe de toute autre légitimité. On comprend mieux pourquoi il a été décrété que « nous sommes en guerre » (j’y reviendrai). Tout en se dotant des possibilités de faire face, au coeur de toute période de fragilité et de crise il se trouve des tentations parfois camouflées dont il faut se méfier grandement.

Par ailleurs, ce projet prévoit d’accompagner l’état d’urgence sanitaire d’une sorte d’état d’urgence social, par lequel il sera permis de déroger au droit du travail, de la sécurité sociale et de la fonction publique. On aurait pu imaginer dans cette période d’interdire les licenciements le temps de la crise en contrepartie des mesures financières décidées plus haut. Mais il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de donner en réalité les pleins pouvoirs aux employeurs pour imposer ou modifier les congés payés, ainsi que l’utilisation des jours de RTT ou du compte épargne temps, pour déroger à la durée du travail, au repos hebdomadaire ou dominical. Ces mesures ont été vivement critiquées par les syndicats. C’est contraire à toute notre jurisprudence et dangereux en temps normaux comme en temps de crise. Face aux circonstances exceptionnelles, il y a besoin d’une mobilisation consciente, réfléchie, partagée, il y a besoin d’organisation, il y a besoin de règles et de respect. En réalité, là encore, on voit surgir les signes d’un projet de société qui est déjà à l’oeuvre et la tentation d’utiliser le moment pour faire avancer des mauvaises idées semble bien présente. Au passage, on a déjà supprimé les CHSCT et l’on mesure qu’on en aurait bien eu besoin pour gérer concrètement les effets de cette crise sanitaire sur le travail au plus près. Le ministre annonce la défiscalisation à hauteur de 1000 euros des primes décidées par les employeurs qui décideraient de gratifier leurs salariés durant cette période. Rémunérer justement le travail oui, mais telle quelle, il s’agit d’une mesure d’incitation au travail, et presque d’une incitation à prendre des risques. 

Le texte prévoit par ailleurs des mesures plus techniques de reports divers et variés qui semblent tout à fait opportunes. Certaines peuvent parfois se discuter. Un débat s’est noué autour des élections municipales dont le premier tour a livré un verdict. Là aussi, il faut s’attacher à la fois à respecter la volonté populaire telle qu’elle s’est exprimée et à éviter toutes les instrumentalisations. 

Aujourd'hui, j’interpelle également le ministre de la santé, notamment sur le développement de tests qui semble tout à fait possible et nécessaire comme l’a recommandé l’OMS et comme l’ont signalé plusieurs chercheurs.

 

* Lire le courrier pour Bruno Le Maire

** Lire le courrier pour Olivier Veran

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