Le grand inventaire des biens communs #CahierDeCrise

On m’a demandé où j’étais, finalement, hier soir, lors de l’audition du Premier ministre, puisque j’avais annoncé ici même ma participation à la mission d’information Covid-19. C’est un peu exagéré, parce qu’il parait qu’on me voyait quand même de temps en temps dans la mosaïque, sur les chaînes d’info en continu. Et que j’ai pu disposer de deux minutes pour donner mon sentiment et poser quelques questions. Mais la mission compte un rapporteur général et huit co-rapporteurs, dont un seul n’est pas membre de la majorité, le Président Les Républicains de la commission des finances (c’est de droit un membre du groupe d’opposition le plus nombreux). C’est habile. Donc on a eu droit à un tunnel de la majorité, entrecoupé des réponses du Premier ministre et du ministre de la Santé, avant que les huit groupes parlementaires puissent s’exprimer et je crois qu’il était à peu près 20 heures quand j’ai eu le micro. C’est ballot. Mais je dois à l’honnêteté de dire que le Président du groupe La République en Marche, Gilles Legendre, a parlé après moi. Bon, on ne fait pas ça pour passer à l’écran, on le fait pour faire entendre la voix des citoyennes et citoyens de ce pays, pour faire avancer les choses et obtenir des réponses. Nous en avons eu quelques unes, mais pas trop. Je ne vais pas me livrer ici à un compte-rendu détaillé, mais c’était très vague sur les pénuries de médicaments et les labos à l’arrêt, de même que sur l’hôpital, pour m’en tenir à ces deux sujets.  

Ce matin, pour témoigner de l’attention à l’ensemble du territoire où je suis élu, je me suis quand même rendu au centre Covid-19 d’Istres

Je ne sors du confinement qu’avec la plus grande parcimonie, je respecte les contraintes de tout un chacun pour ne pas participer à trimballer le virus. Mais ce matin, pour témoigner de l’attention à l’ensemble du territoire où je suis élu, je me suis quand même rendu au centre Covid-19 d’Istres, avec François Bernardini, le Maire, et Michel Colson, l’adjoint à la santé. Là aussi, riches échanges sur la situation et les enjeux. J’ai pu discuter avec le personnel de ménage, les infirmières et médecins, dont le docteur Michel Sciara. Il lui a été demandé de faire une déclaration auprès des autorités pour engager sa responsabilité sur la création de cette structure, sans qu’il soit pour l’heure prévu des financements particuliers. Tout est cependant formidablement organisé, même si, là aussi, on rencontre les mêmes inquiétudes qu’ailleurs concernant le matériel. Des inquiétudes aussi concernant la dimension neurologique du virus. Et des questionnements sur l’utilisation parcimonieuse des scanners. Je vais naturellement faire remonter tout cela. 

Ce soir, j’ai reçu un appel de mon amie Caroline Fiat, qui a repris du service en tant qu’aide-soignante. Cela ne m’étonne pas d’elle. Elle me faisait part du sentiment d’abandon des habitantes et des habitants du Grand Est qui ont subi en premier la montée épidémique. C’est bien aussi notre esprit de solidarité et d’unité qui sont mis à l’épreuve. Je dois dire que dans le traitement qui a été réservé au Professeur Raoult, sans tout ramener à ça, je m’interroge depuis le début sur la dimension Paris-Province, et même plus précisément Paris-Marseille : on n’est pas sérieux, quand on vient de chez nous... On va oublier ça pour l’instant, pardon si je me laisse aller. C’est trop subjectif et trop dans l’inconscient pour pouvoir se vérifier et je n’ai pas l’habitude de jouer les victimes.

Pour dire qu’il y a quand même bien des ressorts qui fonctionnent, j’ai vu passer Camille, qui fait les livraisons de la Croix-Rouge à Martigues, et aperçu sur les réseaux sociaux Denis et Marie-France qui font le ravitaillement pour le secours populaire à Port-de-Bouc. 

Une fois de plus, on ne va pas tout raconter ici, mais j’ai pu tenir par téléphone un rendez-vous annulé pour cause de confinement voici quelques jours à propos d’une maladie orpheline, le Lipoedème, sur laquelle je vais interroger les autorités de santé. 

Aujourd’hui, j’ai également reçu un message de Pascal Philippe, le directeur du centre AFPA d’Istres, qui a fait valoir ses droits à la retraite. J’ai apprécié notre rencontre au coeur de cette bataille victorieuse contre la fermeture annoncée, et son dévouement au service public. C’est dommage de lui souhaiter une bonne retraite dans ce moment, mais ce n’est pas moi qui vais lui dénier le droit à ce nouveau temps de la vie !

Le grand inventaire des biens communs

Enfin, j’arrive au bout de ma chronique sans avoir dit l’essentiel. C’est aujourd’hui que j’ai décidé de lancer le grand inventaire des biens communs. Voici longtemps que je cherche autour de cette idée et que je muris ce projet. Le 30 novembre dernier, à la Fabrique du commun, ma permanence, je réunissais des femmes et des hommes rencontrés dans la vie de la cité, pour leur proposer d’animer ce chantier et de composer ensemble un jury du grand inventaire pour le Golfe de Fos et l’Ouest de l’étang de Berre. Les événements ont un peu retardé le lancement de l’initiative. Il faut le faire sans attendre. Pour préparer ensemble la relance, qui devra être sociale, écologique et démocratique. Pour préparer le monde d’après. Sortons de l’ère de la privatisation du monde, de la marchandisation de tout, de l’accaparement insensé des avoirs et des pouvoirs par quelques uns. Cette course en avant défait nos liens, casse nos outils, abîme l’humain et la planète. 

A l’occasion de ce ralentissement, de cette crise, alors que ressurgissent tant de questions et d’aspirations, l’heure est à réenchanter l’avenir, à nous réapproprier le monde pour mieux nous respecter et mieux le partager. La redécouvertde l’hôpital public s’inscrit dans ce mouvement. Qu’avons-nous en commun ? D’être humains. D’habiter la Terre. Et tant de choses que porte la Terre et tant de choses portées par les humains. Qu’avons-nous en commun ? D’être à égalité sociétaires du genre humain, liés et reliés et c’est bien là le sel de nos vies. Et d’être investis de responsabilités mutuelles et de disposer ensemble de biens communs. Depuis la planète au square de la cité, depuis l’eau jusqu’au droit à la retraite, depuis l’Etang de Berre jusqu’au Port de Fos... Prenons le temps de l’inventaire. Disons ce à quoi nous tenons, ce qu’il faut réparer, ce qu’il faut reconquérir. Et comment. C’est une initiative au long cours à laquelle je vous invite à participer très simplement. Depuis notre fenêtre, faisons l’inventaire et parlons-en ! 

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