Amélioration de l'encadrement des centres de santé

Projet de loi - Explication de vote - 30 novembre 2022

 

Les centres de santé sont des inventions sociales qui ont révolutionné l’accès aux soins et la pratique de la médecine en ville. Pour faire face aux besoins, des municipalités, des mutuelles et des médecins se sont organisés, en inventant des réponses nouvelles : une médecine coordonnée, une prise en charge globale des patients, des dynamiques de prévention, la pratique du tiers payant généralisé. Les centres de santé sont de grandes inventions sociales et pourraient constituer une partie de la réponse à la désertification médicale, mais ils ne sont pas à la mode.


Alors comment ne pas être en colère lorsqu’en outre, des charlatans utilisent cette appellation pour commettre leurs délits et plonger des patients dans une situation dramatique ? Comment ne pas s’alarmer du fait que cela ait été possible, et que les effectifs des ARS ou de la sécurité sociale, notamment ceux dédiés au contrôle, soient si insuffisants ? Il faut dire que le charlatanisme, qui n’a pas d’autre objectif que le profit, peut prendre des formes très variables. La question des moyens consacrés au contrôle demeure dans l’ombre. Je sais que ce n’est pas ce que vous pensez puisque vous avez dit le contraire lors de votre intervention, madame la rapporteure – j’en profite pour saluer votre travail –, mais tout cela amène d’une certaine manière à stigmatiser les centres de santé, comme s’ils étaient par nature des établissements à risque.


Je regrette que nous n’ayons pas saisi cette occasion pour relancer une dynamique de création et de développement des centres de santé. Vous vantez les mérites de la liberté inaliénable d’installation pour les médecins libéraux, et vous établissez ici un agrément pour l’exercice collectif. Nous ne nous opposons pas à cette idée, mais nous nous interrogeons sur les critères qui vont fonder l’octroi de cet agrément, en particulier en ce qui concerne la compatibilité du projet « avec les objectifs et besoins définis dans le cadre du projet régional de santé », comme mentionné à l’article 1er, ce qui donne lieu à un pouvoir d’appréciation discutable. Or le code de la santé publique permet déjà au directeur général de l’ARS, en cas de manquement, de prononcer une suspension ; les sanctions devraient d’ailleurs faire l’objet d’une publication par les ARS.


Vous créez ensuite un comité médical qui vient s’intercaler entre la responsabilité pénale du gestionnaire et la responsabilité individuelle du praticien. Cela revient à créer une instance à vrai dire un peu floue, parallèle aux CSE – comités sociaux et économiques –, ne regroupant qu’une partie du personnel – les médecins –, alors même que l’esprit collectif et le retour critique en vue de l’amélioration des pratiques sont déjà présents par nature dans les centres et inscrits dans l’accord national des centres de santé.


J’ai déposé il y a quelque temps une proposition de loi visant à renforcer les droits des salariés sur l’organisation du travail, devant leur permettre de se réunir par collectifs de travail dans l’entreprise, et je crois qu’il faut creuser dans cette direction, mais faut-il vraiment le faire de la sorte ?


Enfin, en 2018, votre majorité a autorisé la création de centres à but lucratif, venant ainsi dénaturer l’esprit des centres de santé. Cela ne concourt pas à installer la confiance : une telle mesure sert la marchandisation de la santé et organise la concurrence entre de grands groupes privés et d’autres acteurs dans le domaine de l’offre de soins de ville, dentaires et optiques. Nous savons que cela ne répondra pas aux besoins. Nous ne voulons pas entraver le parcours de cette proposition de loi, mais nous souhaitons que ces questions puissent être entendues par la suite.

 

L'intervention en vidéo